Être un Proche et être un Accompagnant

Être un proche tout en devenant un accompagnant, un proche-aidant, est un thème qui mérite d’être de nouveau mis en lumière. Que l’on soit proche-aidant depuis plusieurs années ou que l’on soit récemment amené.e à occuper cette nouvelle facette de son identité, les mêmes ressentis, les mêmes questionnements se posent.

Questionnements tels que « vais-je y arriver, vais-je tenir le coup ? », ou encore « suis-je assez fort.e ? ». Ce sont des pensées « bruits de fond » qui viennent régulièrement frapper à la porte du conscient, en semant le doute, provoquant parfois des sentiments de culpabilité difficiles à canaliser quand fatigue et frustration viennent s’en mêler. D’ailleurs, inutile de leur parler de courage, les personnes n’y voient pas du courage mais une évidence, un « pas le choix » naturel qui devient la norme. Pour autant, être un proche et un aidant à la fois ne s’improvise pas et il existe plusieurs manières d’endosser cette nouvelle facette identitaire.

Certains se projettent depuis plusieurs années, évoluant au sein d’une famille pour laquelle la maladie de Huntington est connue depuis longtemps. D’autres sont projetés de manière plus brutale dans ce rôle, au détour d’un diagnostic qui viendrait d’être posé par exemple, la maladie n’ayant pas été connue au sein de la famille, ou étant restée cachée derrière un tabou familial des générations précédentes.

La mise en action, la recherche de solutions, la prévention, constituent souvent les premières réactions des proches-aidants, à la fois pour répondre au sentiment d’impuissance que la maladie renvoie, mais également pour être utile et tenter d’apporter une réponse pratique et pragmatique au « comment accompagner au mieux ». Pourquoi l’aide sous cette forme n’est pas toujours bien accueillie par la personne atteinte de la Maladie de Huntington ? Entre autres, parce que la personne atteinte de la maladie de Huntington ne souhaite pas se sentir réduite à ce statut de malade de Huntington, comme « condamnée » à représenter un malade aux yeux des autres, à avoir le sentiment d’être sujet de prévenance et de préoccupation. Aussi parce qu’elle souhaite rester décisionnaire dans ses choix de vie.

La question de la temporalité (avoir les mêmes envies, objectifs et priorités au même moment) est toujours au cœur du binôme proche-aidant et personne malade et de l’équipe ainsi formée pour faire face aux impacts de la maladie. Le fait de parler de la maladie, de l’avenir, de la manière de l’annoncer aux enfants ou devoir apprendre à gérer évitements, désaccords, tensions et priorités différentes sont aussi des éléments au cœur de la dyade. Le proche-aidant plus expérimenté recherche lui aussi des solutions. Être proche-aidant c’est s’adapter continuellement, ce qui apporte joie et satisfaction, mais aussi fatigue et irritabilité et culpabilité potentielle. Cela signifie besoin de souffler et de recul, ce qui n’est pas toujours considéré comme possible d’un point de vue mise en pratique : parlez- en ! Proches-aidants, prenez soin de vous, et en prenant soin de vous, vous prendrez aussi soin de vos proches.

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Par Emmanuelle Busch, psychologue

Novembre 2024