Etre aidant d’un proche atteint de la maladie de Huntington

Par Emmanuelle Busch, psychologue pour l’Association Huntington France

Aidants, accompagnants, proches, proches-aidants, désignent avant tout des individus qui se sentent affectivement liés aux personnes à qui ils.elles viennent en aide, ponctuellement, régulièrement, le plus souvent quotidiennement. Il s’agit principalement du conjoint, d’un ou de plusieurs enfants, parfois c’est un membre de la famille, une personne de l’entourage amical.

« Ce n’est pas du courage, c’est normal que je m’occupe de mon mari », «Elle a besoin de moi, c’est elle qui est malade, ce n’est pas moi qui ai besoin d’aide », «Je ne me pose pas la question d’aider ou pas, je n’ai pas le choix, et puis c’est normal » : paroles de proches aidants, qui n’ont pas hésité à réorganiser en profondeur leur quotidien, à reprendre des tâches auparavant gérées par leur proche malade, à mettre entre parenthèses leurs activités, leurs liens sociaux, pour être à la hauteur de ce rôle d’accompagnant.

Venir en aide peut sembler normal, pour autant, cette réorganisation, ce chamboulement des repères impliquent un investissement psychique, physique et même matériel très important, dont les effets sont souvent minimisés, voire banalisés par l’aidant lui-même et d’autant plus invisibles aux yeux de l’entourage.

Être proche aidant, c’est difficile, même si c’est naturel. Dans le cas de la maladie de Huntington s’ajoute la difficulté de symptômes en constante évolution exigeant des adaptations permanentes ainsi que des renoncements. Les liens changent, les relations se transforment, les priorités de chacun.e se modifient. D’où parfois un certain décalage et une incompréhension qui peuvent s’installer, entre le proche aidant anticipant l’avenir et son proche voulant au contraire maintenir le plus longtemps possible à distance les conséquences de la maladie. C’est difficile pour le proche aidant de s’y retrouver entre les différents rôles endossés, de maintenir sa place de conjoint, parent, enfant, sans réduire son identité à celui d’aidant. Difficile aussi de trouver un équilibre entre la tentation de la surprotection, vouloir faire à la place de, et laisser à l’autre la possibilité de faire, à son rythme.

Les sentiments dépressifs, l’isolement, la culpabilité, les problématiques somatiques, la colère et l’impatience, le sentiment d’être abandonné, sont les signes d’un possible épuisement. Les proches aidants ont des besoins, tout comme les personnes malades. Une première étape consiste à reconnaître ses besoins sans les vivre comme un échec, sans culpabilité et sans sentiment d’impuissance. Il s’agit alors de s’échapper des pensées telles que « si je pense à moi, je suis égoïste », « je culpabilise si je prends du temps pour moi, alors qu’il.elle ne peut plus le faire ».

Prendre soin de soi est aussi une manière de prendre soin du proche aimé : être plus patient, se sentir moins coupable, mieux comprendre ses réactions ainsi celles du proche contribuent à trouver les moyens d’une relation plus apaisée.