Comment parler de la maladie de Huntington aux enfants ?

Comment parler de la maladie aux enfants est l’une des thématiques auxquelles sont confrontées les familles concernées par la maladie de Huntington. Comment annoncer la maladie d’un proche, comment expliquer la maladie, ses symptômes, son évolution ? Comment évoquer la question de l’hérédité ?

Les freins et obstacles peuvent paraître nombreux : tabou familial autour de la maladie, sentiment de honte, peur de choquer, blesser voire de traumatiser l’enfant. Peur également de ne pas savoir faire, de ne pas trouver les bons mots. Peur d’être soi-même submergé par l’émotion pendant la discussion, tout en souffrant de ne pouvoir préserver pour l’enfant un monde insouciant et protecteur.

Pour autant, c’est bien par la communication et l’ouverture au dialogue que va s’instaurer un climat de confiance et de sécurité affective. Les tabous, les non-dits, sont eux-mêmes source de trauma, puisque l’enfant « sent » que quelque chose ne va pas, « ressent » qu’un élément inconnu pèse sur sa famille. Nous sommes tous conscients de et avons expérimenté nous-mêmes en étant jeune cette sensibilité accrue des enfants ainsi que leur perception fine du moindre changement ou altération du quotidien. Or, un enfant, ou un jeune adolescent, va projeter dans cet inconnu, dans ce qui n’est pas nommé, de nombreuses idées et pensées fantasmées négatives hautement anxiogènes. Il n’a pas alors pas les mots, ni la maturité émotionnelle, pour comprendre ce qu’il ressent et l’exprimer. De plus, il voudra « réparer » la famille et fera peser sur ses épaules la responsabilité d’œuvrer pour que ses parents, sa famille, se sente mieux.

De même que la maladie ne doit pas rester taboue, les émotions ne doivent pas l’être non plus. Bien au contraire, il est important d’encourager l’enfant à s’exprimer, qu’il s’agisse de sa peur, de sa colère ou de sa tristesse. Toutes les émotions sont légitimes et doivent être autorisées par les parents. Les émotions des parents, des adultes, sont tout aussi légitimes : si l’émotion surgit pendant un échange autour de la maladie, profitez-en pour expliquer qu’à vous aussi, il vous arrive d’être triste pour Papy, Maman, Tata. Laisser les émotions s’exprimer est la meilleure manière de les gérer et d’éviter qu’elles s’accumulent et finissent par sortir brutalement ou par une agressivité ou irritabilité latente. Les mêmes réponses s’appliquent lorsque l’enfant exprime le souhait de rendre visite à un proche dont la maladie est très évoluée : si c’est bien son souhait, l’adulte peut prendre le temps de lui expliquer l’environnement où se trouve la personne malade, la manière dont elle peut s’exprimer, se mouvoir. Prévoyez un temps d’échange après la visite pour laisser à l’enfant la possibilité de s’exprimer, de donner son avis, ses pensées, ses ressentis. Si la personne réside dans un établissement, la première visite peut se faire accompagner d’un soignant qui s’occupe de la personne malade, ou du psychologue de l’établissement.

En fonction de l’âge de l’enfant, entre un enfant et un adolescent, la maturité émotionnelle et les temporalités ne seront pas toutes les mêmes. L’essentiel est d’aller au rythme de l’enfant, sans chercher à anticiper toutes les questions et les réponses. Parfois, il arrive qu’un parent soit surpris par l’absence de questions ou de réaction immédiate, voyant là un enfant indifférent ou n’ayant pas compris la situation. En réalité, c’est que l’enfant va à son rythme pour réfléchir et intégrer les informations qui viennent de lui être transmises, il a besoin de son temps à lui pour s’approprier les nouveaux éléments qui vont faire partie de sa vie. L’important, pour l’adulte, c’est d’avoir ouvert par le dialogue un espace dans lequel l’enfant sait que s’il a des questions, il pourra venir les poser, sans crainte ; un espace dans lequel il se sent écouté, tout simplement.

Alors comment formuler ce que l’on souhaite dire ? Les mots sont importants et ce sont les plus simples et les plus clairs qui fonctionnent le mieux, même si pour l’adulte ils restent parfois difficiles à prononcer. Il est nécessaire d’éviter toute ambigüité qui peut rendre confus le propos et plus difficile la compréhension de l’enfant. L’association propose des livres et bandes dessinées pour vous aider à expliquer de manière le plus simple et le plus adapté possible la maladie à votre enfant ; ils seront très utiles comme support de discussion et soutien au moment de partage. Il existe également dans le commerce de nombreuses bandes dessinées et livres pour enfants et adolescents qui abordent les notions de maladie, de handicap, et de deuil qui favorisent l’appropriation par l’enfant de ces notions complexes, n’hésitez pas à accompagner vos discussions de ces supports.

Emmanuelle Busch, psychologue